Entre le 3 novembre 2017 et le 2 novembre 2018, JED a recensé 121 cas d’attaques contre les médias et les journalistes, un chiffre identique à celui de 2017. Soixante-dix-sept pour cent de ces atteintes à la liberté de la presse ont été commises par les autorités politiques, administratives ou sécuritaires congolaises, engageant directement la responsabilité de l’Etat, pourtant censé garantir et assurer la liberté et la protection de la presse comme l’exigent les articles 24 et 212 de la Constitution. D’après JED, ces attaques ne sont pas des cas isolés mais “font partie d’un système de répression planifié dans le but de faire taire ou faire disparaître tous ceux qui dérangent parce qu’ils ne pensent pas la même chose que les caciques du régime”.
Selon le rapport, le pays a été marqué par une recrudescence du nombre d’arrestations des professionnels de l’information. Quinze journalistes ont été détenus pendant plus de 48 heures au cours des douze derniers mois, un chiffre qui a été multiplié par deux par rapport à l’année 2017. Tharcisse Zongia, directeur du journal satirique Le Grognon se trouve en prison depuis plus d’un mois. Il avait été arrêté le 6 septembre dernier puis condamné à une peine d’un an de prison pour diffamation, la peine maximale en RDC. Plus récemment encore, cinq journalistes du tri-hebdomadaire AfricaNews ont été détenus durant toute la journée du 19 octobre 2018 à la direction des renseignements de la police nationale congolaise à Kinshasa après avoir publié un article sur l’ouverture d’une enquête concernant le détournement présumé de nourriture dans une école de formation de la police.
RSF partage l’inquiétude de JED alors que se profile le 23 décembre prochain une élection présidentielle attendue depuis deux ans. Dans ce contexte pré-électoral tendu, des journalistes ont été agressés, et des médias appartenant à l’opposition ont été suspendus. JED et RSF ont également dénoncé le licenciement abusif de Syande Emaka, Marie Lelo et Benjamin Okakesema, trois journalistes de la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC), qui avaient couvert une manifestation hostile au pouvoir. Le réalisateur Gaël Mpoyo et le monteur Franck Zongwe Lukawa sont quant à eux contraints de se cacher depuis quatre mois après la diffusion de leur documentaire sur des milliers d’habitants chassés d’un terrain revendiqué par le président Joseph Kabila dans l’est de la RDC. La répression n’épargne pas le réseau internet coupé à de nombreuses reprises à la veille et pendant chaque manifestation d’ampleur organisée par la société civile ou des membres de l’opposition.
A l’instar de JED, RSF constate l’inaction des autorités congolaises pour protéger la liberté de la presse. Sur l’année écoulée, aucune mesure n’a été prise pour lutter contre les exactions à l’encontre des journalistes et des médias, malgré les demandes conjointes et répétées des deux organisations. Aujourd’hui, RDC s’appuie encore sur un texte relatif à la liberté de la presse datant de 1996 et adopté sous la dictature du maréchal Mobutu qui renvoie au Code pénal et prévoit des peines de prison et de lourdes amendes en cas de diffamation ou d’injure.